Dans le cadre du projet Création et Internet, l’un des derniers amendements déposés par des députés à l’Assemblée nationale mérite le coup d’œil. Le texte est signé par M. Martin-Lalande, M. Dionis du Séjour et M. Suguenot, il vise une nouvelle fois à remplacer la suspension par l’amende, une issue qui a le vent en poupe et sur laquelle le gouvernement serait prêt à lâcher du lest selon les derniers bruits de couloir.
Plutôt qu’une suspension jusqu’à un an, le texte préconise une amende de première classe soit 38 euros. On ne sait pas encore si l’amende visera chaque téléchargement ou une session (voir l’interview de Martin Lalande chez ZDnet.fr et Ecrans.fr), mais toute l’attention doit être portée sur les faits permettant d’éviter d’avoir à payer cette somme.
Franck Riester Patrice Martin Lalande député
Franck Riester et Patrice Martin-Lalande
Le texte prévoit en effet que le titulaire de l’abonnement peut démontrer avoir été victime d’une fraude (ex : le piratage d’un tiers), ou un cas de force majeure ou, c’est la nouveauté, « qu’il apporte tout élément permettant d’établir qu’il n’est pas l’auteur de l’infraction ». Le titulaire de l’abonnement pourrait ainsi échapper aux 38 euros s’il démontre qu’il n’a pu être l’auteur de l’infraction (par exemple : il était en vacances sur un yacht de luxe prêté par un ami millionnaire, en pleine Méditerranée). Ce texte mélange donc l’infraction de contrefaçon avec celle du défaut de sécurisation, tout en faisant peser la charge de la preuve sur les épaules de l’abonné. A lui donc, de démontrer qu’il est innocent. Belle affaire.
Des agents aux pouvoirs étendus
Autre point qui mérite éclairage dans ce texte est la partie qui concerne les agents assermentés, ces agents agréés par le ministère de la Culture pour constater les infractions sur les réseaux. Martin-Lalande, Dionis du Séjour et Suguenot veulent ainsi permettre à ces personnes travaillant pour les ayants droit d’être « spécialement habilités pour constater par procès-verbal les contraventions prévues au présent article et pour requérir les données de nature à permettre l’identification de l’abonné défini à l’alinéa précédent auprès du fournisseur de services de communications électroniques, dans la limite et pour la durée strictement nécessaires à la verbalisation de l’infraction et au recouvrement de l’amende ». En clair, ces agents pourraient constater les infractions et demander directement les données d’identification afin de permettre la verbalisation et le recouvrement de l’amende.
Deux conditions au retour de la suspension
Dans la masse des amendements déposés par le député Martin Lalande, l’objectif serait de subordonner la mise en place de la suspension à plusieurs conditions : que le système d’amende ne réduise pas significativement la contrefaçon et que le système de suspension soit « euro-compatible ». Si ces deux conditions sont remplies, la suspension serait appliquée au plus tard le 1er janvier 2011...
Outre le fait que la suspension est le « système le plus privatif de liberté », explique l’exposé des motifs, « ce dispositif évite aux FAI d’investir immédiatement de l’ordre de 70 millions d’euros dans l’adaptation des réseaux et des services pour la restriction sélective d’accès. Effectivement, cet investissement ne servirait qu’à cette fonction répressive alors que, d’ici 2 à 3 ans, la même somme investie pourrait être consacrée à un investissement permettant, à la fois, la suspension sélective et surtout le nouveau mode de gestion des paquets (« coloriage » des paquets) sur le réseau internet. Cela permet donc un investissement de modernisation utile à tous les usages de l’internet au lieu d’un investissement à usage uniquement répressif ».
Dans tous les cas, si l'amende passe, ce sera une importante déconvenue pour la ministre de la Culture (ici, ou là, ou là) , Denis Olivennes, ou Pascal Nègre, tous opposés au principe de la sanction pécuniaire.
Source de la news : http://www.pcinpact.com/actu/news/49993-am...sion-agents.htm